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22 novembre 2015

Questions à Jérôme MOITRY, fondateur et DG de Patrimonia Capital

Questions à Jerôme MOITRY Patrimonia Capital

Le groupe Patrimonia, avec 800 millions d'euros d'actifs sous gestion, se lance sur le marché des SCPI. C'est donc via la société de gestion Patrimonia Capital que le groupe lance un nouveau fonds : "Patrimonia Capital et Rendement". Ce dernier démarre avec un patrimoine de 16,6 millions d'euros, constitué d'actifs sélectionnés en périphérie des villes françaises. A l'occasion du lancement de la SCPI Patrimonia Capital & Rendement, nous avons posé quelques questions à Jérôme MOITRY, fondateur et directeur général de Patrimonia Capital. Dans un marché des SCPI particulièrement concurrentiel, il nous dévoile donc son approche des investissements immobiliers.

Nos questions à Jerôme MOITRY

Pourriez-vous nous parler de votre parcours ?

Le groupe Patrimonia a été créé par mon frère, Jean-Hubert Moitry, il y a près de 30 ans. La foncière a très tôt investi dans l’immobilier de périphérie, commerces et locaux d’activité, et a superbement réussi dans cette classe d’actifs peu prisée à l’époque. Le patrimoine représente aujourd’hui 800 M d’euros, avec une diversification depuis quelques années dans l’immobilier patrimonial et le développement en VEFA de pieds d’immeuble dans le cadre du grand Paris.

J’ai rejoint le groupe il y a une dizaine d’année pour construire l’activité de gestion pour compte de tiers, à partir d’un portefeuille d’actifs appartenant à un investisseur institutionnel et qu’il fallait requalifier en OPPCI. Nous avons ensuite créé Patrimonia Capital, société de gestion agréée AMF, et avons au fil du temps ajouté deux autres OPPCI, l’un pour un family office et l’autre pour un club deal d’investisseurs privés.

Nous avons souhaité diversifier notre activité en 2019. L’immobilier en périphérie n’avait alors pas bonne presse, soumis au « retail bashing », et avons mis en attente le projet de proposer une SCPI et un OPPCI sur cette classe d’actifs. Nous avons considéré l’immobilier de bureaux mais avons abandonné cette idée, anticipant l’explosion de ce que nous considérions comme une bulle, et avons décidé de développer une nouvelle activité dans l’hôtellerie. Nous avons depuis investi dans sept hôtels et prévoyons de lancer un produit sur cette classe d’actifs en 2025.

Au sortir de la crise du Covid nous avons noté avec satisfaction le nouveau regard porté par le marché sur la périphérie, classe d’actifs que nous connaissions parfaitement et qui acquérait enfin ses lettres de noblesse, le marché réalisant sa résilience aux crises. Nous avons donc relancé le projet de SCPI fin 2022 avec comme principe de tirer profit des forces du groupe en faisant apport d’un premier portefeuille d’actifs aux performances maitrisées. L’encadrement bien normal du conflit d’intérêt potentiel par l’AMF a ralenti le projet, de même que notre souci de démarrer du bon pied avec une équipe solide, expérimentée sur les SCPI, un outil de travail moderne entièrement digital et une participation forte des CGP comme membres fondateurs et du conseil de surveillance. Le projet a pris près de deux ans et nous avons aujourd’hui une SCPI dotée d’un patrimoine de 16,6 M d’euros et d’un report à nouveau dès son premier exercice.

Quelle stratégie d'investissement souhaitez-vous déployer à travers cette nouvelle SCPI ?

Notre stratégie d’investissement est de cibler ces actifs de périphérie, commerces et locaux d’activité, que nous connaissons si bien, exclusivement en France. Cette classe d’actifs a démontré sa pertinence d’un point de vue des consommateurs, des enseignes et entreprises, grâce à leurs emplacements et leurs niveaux de loyers contenus. Ces actifs sont de tailles raisonnables, souvent inférieures à 5 M d’euros.

Quelle sera votre approche en termes de diversification des actifs tant en termes de typologie que géographique ? Vous indiquez vouloir vous concentrer uniquement sur le territoire français, pourquoi ?

Nous visons d’être une SCPI diversifiée, avec une mix équilibré entre commerces, locaux d’activité, logistique du dernier kilomètre, en périphérie des villes françaises. Nous serons présents partout en France, dans toutes les périphéries des villes que nous connaissons comme présentant un attrait et un niveau de risque maitrisé. Cette classe d’actifs nécessitent une connaissance fine de son environnement. Nous sommes déjà conscients des erreurs qui peuvent facilement être faites par une analyse lointaine, superficielle, des sites en périphérie, ce n’est donc pas pour aller d’emblée dans d’autres pays, aux lois, pratiques, écosystèmes différents. L’embellie actuelle, la petite musique un peu rapide sur le thème des superbes opportunités ouvertes par les « nouvelles conditions de marché » nous incitent à la plus grande prudence. Les actifs de qualité en sont pas bradés, méfions-nous des belles affaires !

Comment votre SCPI va-t-elle se différencier par rapport aux multiples solutions d'investissements présentes sur le marché ?

Nous nous différencions par l’expérience et le savoir faire que le groupe a développé en 30 ans sur cette classe d’actifs de la périphérie, qui est clairement une affaire de spécialistes. Nous mettons clairement en avant le track-record que nous avons auprès de nos partenaires CGP et de leurs clients. Pour assurer un rendement sur le long terme, il ne faut déjà pas prendre de risque sur le capital.

Comment la crise immobilière actuelle influe-t-elle sur votre stratégie d'investissement ?

Finalement assez peu. Notre classe d’actifs ne subit pas la crise, en tout cas, ce n’est pas le cas pour les bons actifs. La seule différence est que nous ferons certainement moins de levier bancaire que nous aurions fait en période de taux bas.

Comment assurerez-vous une gestion responsable et durable du fonds que vous êtes en train de lancer ? Dans vos communications, vous avez indiqué ne pas vouloir obtenir le label ISR, comment intégrez-vous l'ESG dans votre politique de gestion des actifs ?

Nous avons effectivement envisagé la labellisation ISR et avions mené les études avec tous les conseils qui suivent ces sujets. Nous avons beaucoup appris et surtout réalisé que cette labellisation entrainait une forte charge administrative, règlementaire, sans réelle valeur ajouté autre que d’avoir un label. Nous avons suffisamment de contraintes règlementaires aujourd’hui dans notre activité pour ne pas en rajouter de notre propre chef. Toutefois, nous sommes convaincus que des améliorations dans le domaine de l’ESG ne peuvent qu’améliorer la valeur de nos actifs, voire même, plus grave, que de ne rien faire pénaliserait nos capacités de revendre ces actifs le jour voulu. Nous avons donc développé notre propre grille ESG (dont certains critères sont assez classiques, comme la consommation énergétique), avons noté tous nos actifs, relevé toutes les actions possibles et comptons faire cela sur toutes les futures acquisitions. Ainsi nous suivrons l’amélioration de notre portefeuille dans le temps et mènerons les actions les plus créatrices de valeur.

Vous avez probablement déjà sourcé de l’investissement à réaliser. Comment l’avez-vous identifié et aurez-vous recours au crédit pour le sécuriser dans un contexte de collecte plus faible ?

Nous avons effectivement un pipeline d’opportunité en cours d’analyse, encadré par un comité d’investissement mis en place. Au niveau du groupe, nous avons un encours bancaire important et disposons de relations de travail et de confiance solides avec la majeure partie des établissements bancaires français. Nous avons un premier financement bancaire adossé à ce premier portefeuille d’actifs mais nous n’avons pas prévu dans les premiers temps de rajouter de la dette à la SCPI. Evidemment nous réévaluerons cette politique très régulièrement.

Avez-vous une thématique spécifique non adressée par nos questions que vous souhaiteriez mettre en avant ?

Nous sommes conscients d’arriver sur un marché largement engorgé par le lancement récent de nombreuses SCPI. Une « course à l’échalotte » est engagée à qui proposera le taux de distribution le plus élevé. Nous aurions pu suivre cela compte tenu des réserves dont nous disposons mais nous ne le ferons pas car voulons communiquer clairement à nos partenaires CGP et leurs clients que l’enjeu est d’assurer une distribution solide sur le long terme. L’investissement immobilier est un investissement de long terme qui mérite une approche qui s’inscrit dans la durée. Nous voulons résolument être des partenaires stables et de confiance pour les CGP et leurs clients.

Conclusion

Nous remercions Jérôme MOITRY d'avoir accepté de répondre à nos questions sur ce nouveau fonds. La SCPI Patrimonia Capital et Rendement s'inscrit donc dans un marché déjà largement pourvu en solutions d'investissement immobilier. Dotée d'un patrimoine initial de 16,6 millions d'euros, cette nouvelle SCPI se concentre exclusivement sur l'immobilier de périphérie français. Un secteur que le groupe Patrimonia déclare en outre connaitre depuis trente ans. La société de gestion a choisi de ne pas obtenir la labellisation ISR. Elle juge en effet que les contraintes administratives sont trop nombreuses pour obtenir ce label. Elle a toutefois mis en place sa propre grille d'analyse ESG. Par ailleurs, de nombreuses SCPI récentes affichent des objectifs de rendement élevés. Patrimonia Capital privilégie quant à elle une approche plus prudente. La société vise en effet un rendement minimum de 5,5% sur le long terme. Les performances futures seront liées aux évolutions du marché immobilier. Elles dépendront également de la mise en œuvre réussie de la stratégie d'investissement.

Source : Propos recueillis par Deeptinvest lors d'une entretien avec Jérôme MOITRY, fondateur et Directeur Général de Patrimonia Capital - 21/11/2024